08 mars 2016

Commission de contrôle des professionnels immobiliers: un retard coupable

Par François Gagnon, Président ERA Europe et ERA France


La loi ALUR, véritable monument législatif, est loin d'avoir donné tout ce qu'elle nous a promis. Près de deux ans après sa promulgation, le 24 mars 2014, nombre de ses décrets d'application sont encore à paraître. On estime que la moitié seulement des textes règlementaires en découlant est disponible. Derrière cette proportion quantitative, en soi fâcheuse, il faut noter que certaines dispositions de la loi comptaient plus que d'autres pour la vie quotidienne des ménages et que le retard de leur entrée en vigueur constitue un réel préjudice. Il en va ainsi de la Commission de contrôle des professionnels de la transaction et de la gestion.

De quoi s'agit-il? La loi a voulu que les particuliers puissent obtenir un jugement rapide, sans frais, et une réparation éventuelle en cas de différend avec un agent immobilier ou un administrateur de biens. A côté du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilière - organe consultatif pour tout ce qui concerne la vente, la location et la gestion - la Commission de contrôle est un organe judiciaire et disciplinaire. Elle devrait être constituée majoritairement de magistrats et à part égale de représentants des professionnels et de consommateurs.

On mesure bien l'importance de cette instance. Les ménages ne cachent pas leur suspicion envers les agents immobiliers et les administrateurs de biens lorsqu'on les interroge. Il faut reconnaitre que le corps professionnel est dans l’incapacité de s'auto-sanctionner lorsque l'un des siens faillit. Les fédérations n'ont pas démérité, sans disposer du pouvoir suffisant, qui doit aller notamment jusqu'à la possibilité d'interdire d'activité un professionnel indélicat. On sait le mal qu'un professionnel méprisant des règles fait à sa communauté toute entière. On sait aussi que les enjeux du logement exigent la plus haute intégrité: faire appliquer ce fonctionnement vertueux est impératif, et la justice ordinaire, manquant de moyens, n'est pas adaptée pour trancher rapidement et avec compétence les problèmes qui peuvent affecter nos clients dans leur relation avec nous.

Alors pourquoi cette Commission de contrôle n'est-elle pas encore installée? Le CNTGI a travaillé à marches forcées pour rendre au gouvernement un avis sur ce que devait être le code de déontologie, et les ministères de la justice et du logement l'ont d'ailleurs suivi et sans délai. Bref, les conditions de l'installation de la Commission sont réunies et six mois plus tard l'enfant n'est toujours pas né. On entend que la raison serait sordide : le financement de l'instance ne serait pas trouvé.

Le besoin de mettre en place l'arsenal prévu par le législateur pour assainir le lien entre les Français et les professionnels immobiliers est impératif. Différer de le satisfaire est condamnable et irresponsable. Qui plus est, les pouvoirs publics laissent accroire par leur négligence que les professionnels ne veulent pas de cet organe de discipline et qu'ils jouent la montre: on a déjà entendu cette interprétation mais il se trouve que la vraie raison est simplement irrecevable! Alors on en cherche une autre, qui pourrait l'être.

Une fois de plus, nous assistons à des effets d’annonces de la part du gouvernement. Nous n’attendons plus qu’une chose, qu’il tienne ses promesses. Les organisations professionnelles d'agents immobiliers et d'administrateurs de biens, qui siègent au CNTGI, les grandes enseignes, de franchise, tous les entrepreneurs du secteur immobilier appellent de leurs vœux la Commission de contrôle. Les pouvoirs publics ne peuvent plus, sous des prétextes inaudibles, repousser sa création. Ils mépriseraient les familles et les professionnels de la transaction et de la gestion à leur service.

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