24 octobre 2016

Décret relatif à la prise en compte du patrimoine dans le calcul des APL : Une mesurette de plus, et toujours pas de réforme de fond

Dimanche dernier, sans avertissement, est paru le Décret relatif à la prise en compte du patrimoine dans le calcul des APL. La teneur du décret est étonnante : il semble en effet peu cohérent de considérer qu’un revenu qui n’est pas imposable à l’IR doit être pris en compte dans le calcul d’une aide. De même, comment justifier que le loyer implicite d’une résidence secondaire soit pris en compte, alors qu’il n’est pas imposable ? Quant à l’estimation des revenus du patrimoine financier, le moins que l’on puisse dire est qu’elle est fantaisiste : le revenu des propriétés immobilières est calculé d’après les valeurs locatives, dont on sait qu’elles n’ont pas été révisées depuis 45 ans, et celui des placements financiers est fixé arbitrairement à 3%, alors que le taux d’intérêt des livrets défiscalisés s’étage entre 0,5% (CEL) et 1% (PEL).

Ce nouveau mode de calcul prend en compte le patrimoine des ménages, si sa valeur totale dépasse 30 000 €, à l’exclusion de la résidence principale et des biens à usage professionnel. Dans ce cas, outre les revenus imposables, sont désormais inclus dans les ressources prises en compte les revenus supposés du patrimoine non soumis à l’impôt sur le revenu, à savoir :

le patrimoine immobilier, à l’exception de la résidence principale et des biens à usage professionnel. En clair, il s’agit pour l’essentiel des résidences secondaires et des terrains non bâtis non loués,
le patrimoine financier :

- livrets défiscalisés (livret A, livret jeunes, LEP, LDD, et Epargne logement) ;
- probablement l’assurance-vie (dont le PEP) et les PEA.

La prise en compte du patrimoine était prévue pour 2016 dans la loi de finances. Il s’agit manifestement d’une mesure d’économie à portée limitée, mais tout de même non négligeable puisque, selon le gouvernement, 600 000 locataires, soit 10 % des allocataires, pourraient être concernés, pour une économie de l’ordre de 100 millions d’euros, c’est-à-dire très peu au regard d’une masse de quelque 17 milliards d’euros. En fait, l’administration n’a probablement qu’une très vague idée de son impact, car le patrimoine des allocataires n’est pas connu. L’évaluation repose donc vraisemblablement sur des hypothèses fragiles.

Ce bricolage créé une rupture d’égalité en fragilisant les plus âgés des locataires. Ceux-ci, qui espéraient s’appuyer sur leur épargne pour faire face aux imprévus de la vie, risquent de voir leurs économies fondre pour régler cette perte d’allocation. Cela va aussi pénaliser les jeunes locataires, qui espéraient pouvoir épargner pour devenir propriétaires, devront retarder leur projet de vie.

Ce décret prouve encore une fois l’incapacité de nos gouvernants à mener une réflexion de fond sur l’attribution des APL.

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