La campagne pour les élections présidentielles a commencé. Pour la droite et le centre, la mécanique des primaires s'est imposée. D'autres partis, le Parti socialiste ou encore Europe Écologie Les Verts ont pris la même option. Ainsi, les Républicains ont tiré les premiers, conduisant chaque candidat à dévoiler l'essentiel de son programme, en particulier pour le logement.
Deux constats : sans cette contrainte de calendrier, c'est un lourd silence qui aurait pesé sur la question du logement, et en second lieu, ce qui est révélé prouve que les volontés de réformes et de renouveau exprimées par les candidats ne concernent pas le secteur du logement. On est d'abord frappé par l'indifférence naturelle de celles et ceux qui postulent à la magistrature suprême pour le logement. La sécurité et l'emploi obsèdent le champ de la réflexion publique. Or, le logement est une question corolaire, tout le démontre. La difficulté des entreprises à loger leurs salariés est désormais identifiée comme un blocage au développement économique. La vigueur de la construction conditionne la création d'emplois durables et non délocalisables. On n'ignore pas non plus que par le logement commence le vivre ensemble. Il faut dire que la période n'incline pas les politiques à s'intéresser au logement : le marché va bien et les problèmes structurels sont occultés par la grande santé du moment.
Lorsqu'ils en font l'effort néanmoins pour les besoins de l'exercice de la primaire, les candidats tombent dans le travers de la mauvaise analyse. Il leur manque de la hauteur et confondent dispositifs d'aide conjoncturels et organisation structurelle de la construction et du marché. Il faut d'abord dire que l'idéal d'une France de propriétaires est inadapté à la nouvelle donne sociologique du pays et que la réponse locative est sans conteste aujourd'hui majeure. Un parc locatif privé et un parc HLM forts constituent deux piliers essentiels. L'indispensable mobilité professionnelle, l'instabilité des cellules familiales, l'évolution des mentalités, qui font passer l'usage avant la détention à tout prix, conduisent à ne pas fonder la politique du logement sur la seule accession à la propriété.
Il est admis par tous que les dispositifs fiscaux, loi Scellier ou loi Pinel, et les avantages fiscaux, du type TVA, plus-value, droit de mutation ou droit de succession, ont des effets inflationnistes notamment sur le prix du foncier. Il vaudrait mieux consacrer ces postes budgétaires à la baisse directe des impôts.
Quant à l'accession, pourquoi vouloir l'aider aujourd'hui ? La baisse des prix dans l'existant, la maîtrise des prix de sortie dans le neuf, la chute des taux d'intérêt couplée au rallongement des durées de crédit ne sont-ils pas des catalyseurs suffisants ? La vigueur des ventes, qui entraîne celle recouvrée des mises en chantier, en atteste.
Les candidats ont en outre les yeux rivés sur les zones tendues. Ils s'empêchent de voir le reste du territoire et n'expriment aucune vision de son aménagement. Ils accréditent la thèse que tous les ménages peuvent se loger dans les grandes agglomérations et que la politique du logement doit le leur permettre : c'est une illusion et un leurre pour les électeurs.
Et puis vient l'enjeu de fraternité. Nos villes et nos quartiers sont pour trop d'entre eux déséquilibrés. La mixité entre le statut de propriétaire occupant et celui de locataire, au-delà de la mixité sociale, doit guider la stratégie des organismes HLM. Certes, la vente en accession dans leurs patrimoines est génératrice de richesse pour réinvestir et abonder le parc. C'est surtout la voie pour substituer aux tensions la sérénité et la concorde dans les immeubles. A cet égard, les organismes doivent avoir à souci non seulement de céder une partie de leur patrimoine en accession à la propriété, mais aussi d'accompagner les parcours d'accession pour qu'ils soient réussis. A cet égard, les discours de défiance envers le Mouvement HLM, dans lequel se complaisent par clientélisme certains candidats, sont malvenus. Ce sont des acteurs déterminants de l'équation sociale française. Il faut arrêter de penser que les HLM sont réservés à des nantis : 50% des attributions sont faites à des personnes sous le seuil de pauvreté et les premiers opposants à la vente HLM sont les élus locaux.
Il est plus que temps que nos dirigeants comprennent que, pour soutenir le secteur du logement, il faudrait soutenir les élus, qui déterminent en délivrant les permis de construire, ce qui se construit. Le gouvernement Valls a fait un premier pas en créant un système de prime à la construction pour les élus bâtisseurs. Il faut cependant aller plus loin en retirant les conditions restrictives pour accéder à cette aide et en en augmentant la somme. Il est bon de rappeler que l’investissement public et les règles de construction des PLU créent de la plus-value foncière. A ce titre, il serait injuste et dommageable de supprimer les droits de mutation ou de succession qui alimentent les caisses des collectivités locales.
Une bonne idée s’est tout de même glissée dans plusieurs des programmes des candidats à la primaire de la droite et du centre : François Fillon, Jean-François Copé, Bruno Le Maire et Nicolas Sarkozy proposent de créer un bail à loyer modéré pour les locataires, qui aurait pour conséquence d’augmenter la base taxable de l’ISF. Une telle mesure devrait permettre aux propriétaires de mettre sur le marché des logements aujourd’hui non occupés.
La politique du logement doit être entièrement repensée, et les candidats de la droite et du centre ne semblent pas en avoir pris la pleine conscience. Il faut revoir les préceptes qui tiennent lieu de lois irrévocables à tant de nos dirigeants aujourd’hui. Pour être efficace, le prochain gouvernement devra suivre trois mesures fortes : arrêter les aides fiscales pour soutenir la production de logements neufs, aider les élus locaux et faire baisser les impôts.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire